samedi 23 février 2013

Une CAN au pays des étalons... Des idées controversées !



Souvenez-vous, il y a quelques jours je vous retransmettais les exploits de l'équipe de foot burkinabée au sein de la CAN 2013.
Après avoir été sélectionné pour les ¼ de finale, les étalons s'en vont donc défier le Togo remportant au bout la qualification pour la ½ finale...
Etape par étape, petit à petit, l'équipe s'en va se battre pour une place en finale face au Ghana...


1/ THE match!

Match difficile, le Ghana est un adversaire redoutable m'apprend-on. Le Ghana nous assigne d'un penalty dans la première partie. L'arbitre de la rencontre fait de telles erreurs qu'on peut entendre « VENDUUUUUU !!! » !
Assignant Jonathan Pitroipa, l'homme de la compétition, au vestiaire suite a un double carton jaune absolument démérité, l'arbitre de la rencontre a véritablement obtenu le titre de bête noire de la CAN. D'autant que quelques minutes après il refuse un but marqué par Bancé « en toute légalité » sans vraiment savoir pourquoi...

Mais les verts n'ont pas dit leur dernier mot... A 10 sur le terrain, ils réussissent à égaliser tant bien que mal, reprenant au Ghana son espoir d'aller directement en finale.
La fin du match à sifflé, les prolongations sont looooongues. Aucun but.
Tirs au but, stress, cris, angoisse, et finalement le Burkina a retrouvé justice en remportant cette épreuve haut la main !!

Ouffff !!

C'est la folie dans Ouaga et dans le pays tout entier.
Il faut danser, boire pour célébrer cela, crier, klaxonner...

Puis vient le jour de la finale. Il faut savoir que toute la semaine fut sous le signe de cette victoire. Les étalons n'avaient pas marqué un but depuis 1998, ils n'avaient jamais passé les ¼ de finale dans la CAN.
Imaginez alors la vie des supporters : sifflements, portant le maillot de l'équipe, drapeau au vent, bières, shaw, etc, et ce chaque jour jusqu'à la finale.

Puis vient le fameux dimanche.
On va s'installer maquis dès 16h pour être sûr d'avoir suffisamment de place puisque nous sommes une douzaine à nous retrouver, au moins ! On trinque, on danse, on se prend du vuvuzela plein la tête toute la soirée, à 17h mes tympans avaient déjà creusé leur tombe, bref, folie.
Eh puis le match commence, c'est chaaaaaud, le Ghana ne fait qu'action sur action, ils manquent de marquer une dizaine de fois, et là, coup de massue, but du Ghana. Il faudra attendre la seconde période pour reprendre espoir mais rien n'y fait, nos étalons cafouillent, ils ratent beaucoup de passes, beaucoup de corner, etc.
C'est la défaite... Quelques uns ne traînent pas, aussitôt le coup de sifflet final donné, ils rentrent chez eux. Il y a ceux qui se relèvent tout de suite pour célébrer la deuxième place sur le podium puis il y a ceux, comme moi, qui ont besoin d'un petit temps de digestion avant de reprendre le shaw. Parce que quand même, une finale, c'est beau, ne prendre qu'un but de la part du Ghana c'est fort, alors on l'applaudi cette équipe du Burkina, qui depuis 1998 n'avait pas marqué.
Et on en reparlera le lendemain. Et figurez-vous que ce lundi là, ce lendemain, eh bien les boutiques étaient fermées, l'après-midi les enfants ont déserté les écoles pour fêter cela encore et encore. Lundi soir les joueurs attérissent au Burkina depuis leur avion privé, mais c'est le feu à l'aéroport, un virus à touché tout le monde, on fuit pour filer à Ouaga aller acceuillir les jours. Mais ce n'est pas terminé : le président Blaise Compaoré annonce que le mardi est chômé/payé !!!! Ok c'est parti pour la teuf !!

Pfiou, quelle aventure.




 











2/ Les « qu'en dira-t-on »... (ça s'écrit bien comme ça??)

Maintenant, derrière les tribunes, juste après le plaisir qu'incombe les victoires des verts, il y a quand même ces questionnements et cette colère de la part des habitants du pays : l'Etat burkinabé étant le premier sponsor de l'équipe de football nationale, il décide d'attribué 3 500 000 FCFA à chaque joueur en prime de match gagné. Puis à partir de la ½ finale, cela double, on parle de 7 000 000 par joueur...

Mais alors que l'école reste payante et donc non abordable pour certaines familles, alors que bon nombre de villages n'ont pas assez d'infrastructures pour développer les cultures, les récoltes et ainsi nourrir leurs populations, alors que le système de santé impose aux patients de payer la totalité de leurs soins même minimes, on se demande comment le gouvernement peut annoncer qu'il va offrir 7 000 000 à chaque joueur à chaque match remporté.......
Pour information, le seuil de pauvreté au Burkina s'élève à 80 000 FCFA/an/habitant. Un salaire moyen pour une personne ayant un emploi correct varie entre 30 000 et 70 000 FCFA/mois.
La scolarité en primaire est de 25 000 FCFA/an/élève, au collège elle grimpe à 70 000FCFA/an/élève, au lycée on passe les 80 000 FCFA et en ce qui concerne les études universitaires, chaque élève à intérêt à ne pas rater ses années car il verra ses parents se tuer à la tâche pour lui financer.

Il faut savoir également qu'ici, on a imposé le système LMD aux universités. Licence, Master, Doctorat. Mais tel que ce système est créé, il exige des étudiants qu'ils puissent très régulièrement faire des recherches de leur côté, en dehors des cours dispensés. On sait que les bibliothèque sont pauvres et internet est cher, la connexion n'est pas toujours bonne, chaque étudiant n'a pas les moyen de s'offrir un ordinateur, etc, etc (« quoi, quoi, quoi » comme on dit ici).
Alors, on voit les enseignants et étudiants tirer les langues pour calquer le système LMD dans un pays qui n'y correspond pas.
Comment peut-on imposer de telles choses sans même s'y préparer. On laisse alors les étudiants s'inscrire, on leur dispense leurs premiers cours, eh puis en cours d'année on s'arrête pour réfléchir, on grève, on galère à corriger les copies des étudiants car on n'a pas pensé à formé les professeurs aux nouvelles exigences des examens.
C'est ainsi que je vois mes amis en attente de leurs résultats d'examen de Deug de Biologie et Géologie depuis le mois de juin...
Cerise sur le gâteau, ou plutôt arsenic sur mort aux rats, on fini par leur annoncé que leur année est annulée, que compte tenu des cours dispensés à cette période, ils ne correspondent pas au système instauré aujourd'hui. Je ne sais que dire à mes amis, je reste bouche bée devant tant de manque de respect pour ses étudiants et leur famille qui se sont donné tant de peine pour suivre des études. Je suis en colère mais je les voit découragé, et même pas surpris, alors je me tais, j'arrête de me mettre en colère, je reprends mes esprits et ma sagesse, ainsi est la vie ici.
Il faut que ça change.

Arrêtons de vouloir à tout prix imposé des systèmes occidentaux qui fonctionnent dans certains pays mais qui ne peuvent pas fonctionner partout. Adaptons-nous à chaque état, à chaque population.

Et tant qu'à faire, ouvrons la question de l'Education Nationale burkinabée. Calquée sur le système français, elle propose exactement les mêmes cursus. Et un soir, autour d'un thé, je discute avec un ami qui me demande ce que je pense. Je lui renvoie sa question comprenant qu'il en a quelque chose à dire lui de tout ceci. Et il m'explique qu'ici, on forme les étudiants à des filières qui ne leur serviront pas dans la mesure où on peut faire Lettres modernes, Sociologie, Psychologie, Histoire, c'est beau, c'est intéressant, mais ça débouche sur quoi concrètement... Il n'y a pas d'emploi. Dans ces domaines là, seules les associations œuvrent mais l'argent c'est une galère pour le trouver, pour embaucher des professionnels.

Alors les grands utopistes, comme moi, se diront que les études ne sont pas toujours faites pour débaucher sur un emploi mais bien plus pour s'ouvrir sur le monde et pouvoir le critiquer après en avoir compris un minimum de tenants et d'aboutissants.
Mais le problème est toujours là, pendant que les étudiants apprennent de belles choses, il ne se forment pas aux métiers techniques qui leur permettraient d'acquérir des activités génératrices de revenus (AGR). Mais alors développons ces filières techniques. Ou bien demandons une fois de plus à l'état de ne balancer son peu de « combo » par les fenêtres et de créer des infrastructures adaptées aux besoins de ce pays qui emploieront des gens qualifiés pour y répondre (on parle des causes des enfants en situation de rues, des familles en incapacité de nourrir leurs enfants, de les soigner, de les habiller, de les scolariser, on parle des exploitations encore trop nombreuses d'enfants dans le dos de leurs parents, des conflits internationaux qui font se déplacer des populations au sein des pays frontaliers sans qu'il n'y aie de place pour eux, d'un coup de pouce offert aux enfants en leur fournissant des lampes solaires leur permettant de faire leurs devoirs le soir après la tombée de la nuit, on peut parler de plein de sujets...).

Bref, le monde reste le monde, et derrière cela on rentre dans des débats d'instances politiques et internationales qu'on a toujours tenu sans que les choses ne changent vraiment alors on comprendra que de nombreuses personnes soient découragées et fâchées.

Je vous laisse y réfléchir, approfondir les questions, ou pas. Je voulais simplement vous transmettre un peu de ce que j'apprends ici et vous dire que où que vous soyez, si l'école est gratuite pour vous ainsi que les soins, appréciez-le, vraiment, savourez-le, essayez de moins vous plaindre des petites contrariétés qui ne font pas de malheur, les enfants, allez à l'école sans rechigner, mais choisissez bien votre voie, ne laissez pas les autres vous imposer des choix inadaptés aux possibilités que vous offrira la vie ensuite...

Alors ainsi je ferme la page, je pense à vous, de l'autre côté de la mer, vous me manquez parfois, je pense à vous souvent, et je reste une française qui tente tant bien que mal de passer inaperçue dans un pays burkinabé.


A bientôt !!


Sarah

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